Dave : D-01044 Anv : LE BONNIEC (Mme RIOU) Anv bihan : Louise Adstummoù an anv : RIOU ( née LE BONNIEC) Louise Lec’h liammet : Pluzunet (Plûned) Micher : Agricultrice Notennig :
TROADEG Ifig, Carnets de route, p. 20 et p. 24 : Louise Le Bonniec, Mme Riou, (1902-1994). (Se reporter à sa biographie et son répertoire par ailleurs).
Louise était née en 1902 et n’avait jamais quitté la région de Bégard de toute sa vie.
Ses parents étaient de petits cultivateurs trégorrois originaires de la région de Tonquédec et Bégard. Son père, qui avait soixante-quatorze ans à la naissance de Louise, devait décéder moins de quatre ans plus tard, ce qui fit dire à Louise que si elle avait beaucoup chanté, elle avait aussi beaucoup souffert et beaucoup pleuré. Elle ne fréquenta l’école que pendant un an et demi et fut mise en pension vers l’âge de dix-onze ans chez les sœurs à St-Eloi. A quatorze ans, il lui fallut s’engager comme bonne dans les fermes des environs pour gagner sa vie. Elle s’installa ensuite dans la petite ferme parentale de Rubeuz (près de Kroaz ar Marchosioù à Pluzunet) où elle se maria. Louise avait une force de caractère qui l’avait aidée à faire face à une vie difficile et à des événements tragiques comme l’at- taque d’un convoi allemand par de jeunes résistants tout près de leur ferme le 3 Juillet 1944. Ces misères passées n’avaient entamé ni sa bonne humeur ni sa vitalité.
Quand on la rencontra en 1979, elle coulait une retraite heu- reuse et bien méritée près de Marie, sa fille unique, qui veilla sur elle jusqu’à son décès en 1994.
Louise possédait un immense répertoire qu’elle partageait avec beaucoup de plaisir et d’entrain. Elle appréciait beaucoup nos visites et nous appelait, Nanda et moi, ses « vrrrrais amis ! ». On en était très fiers ! Elle avait une mémoire extraordinaire qui nous surprenait à chaque fois et nous émerveillait : histoi- res fantastiques, chansons, rimadelloù, intersignes, gwerzioù, comptines, blagues, croyances… Une simple question anodi- ne lançait l’après-midi : « Louise, daoust hag-eñ ‘teus klevet komz ouzh… ? » (Louise, as-tu entendu parler de… ?). Elle nous avait dit elle-même un jour « Ya, me a zo ur grilleuse de cassettes ! » (Oui, moi je suis une grilleuse de cassettes !)… c’est tout dire !
Elle tenait la majeure partie de son répertoire de sa mère et de sa famille : des sonioù, des gwerzioù, tout droit sortis des col- lectes que fit Luzel 100 ans auparavant auprès de son illustre compatriote Marc’harit Fulup qui vivait au village de Saint Idunet à Pluzunet, à un kilomètre de chez elle. Elle nous aura chanté et livré des informations sur plus de 50 chansons :
- Des gwerzioù : « Gwegan ha Mogero », « Mari Flourio », « Renean ar Glaz », « Erwanig al Lintier », « An Aotrou Koa- driou ha Janig Riou », « Kloareg ar Glao », « Isabel ar Iann hag ar Souiz braz », « Erwanig Prigent », « Yannig Kongar », « Kroaz aour Plouared », « Janedig Koant », « Fañch ar C’hal- vez », « Yannig ar Gall ha mab ar sakrist », « Fontanella »
- Des complaintes ou chansons plus récentes : « Jivestan Bou- der ha Herve ar Geldron », « Herriet ha Damon », « Kêr Is », « Ar faineant hag an interesant », « Ar pesk ebrel », « Ar paotr yaouank Erwan », « Disput etre ur person hag ur menajer », « Erwanig Michel », « Ar gizioù nevez », « Victor Malewas », « Me a zo manet minor », « Boñjour ma dous ma c’harantez »,
« Pierre an Hery hag Anette Tilly », « Ar fall paotr », « Caroline ha Pauline », « Ur plac’hig yaouank », « Ma mestrezig a zo koant »
- Des sonioù : « M’am bije bet kreion », « Tosenn Lein ar Roz », « Plac’hig an Douar Nevez », « An noz kentañ ma eured », « Merc’hed yaouank pa dimefet », « Rene Rambal », « An den nav wech intañv », « Kog Fañchig Du », « Dom Yann Geryann ha François Simon », « Gwilhom ar Floc’h », « Deus a gos- tez Treger », « Bonomig », « Ar wezenn avaloù », « Ma Yan- nig », « Annaig ar Rousval ha Run ar Go », « Ar paour-kaezh Yannig », « Ar butun »
- Des chansons en français ou moitié français/moitié breton : « Trois jeunes soldats », « Gaiement la cruche sur la tête », « Ah pa oan plac’h yaouank », « En ce temps-là, vous n’étiez pas marquise »
Louise connaissait aussi des histoires étranges qui auraient cer- tainement inspiré Anatole Le Braz : « Kroaz ar Marchosioù », « les cloches sous la révolution », « Ma mômm », « ar miliner o lenn e levr kozh » (le meunier lisant son vieux livre), « Agripa Pipi Du » (l’Agrippa de Pipi Du), « une nuit dans l’ossuaire », « les 3 jumeaux », « Tadig Kozh »…
Quand on l’interrogeait sur Marc’harit Fulup, décédée en 1909 et dont elle avait bien sûr entendu parler dans son enfance, elle disait malicieusement « Goût a ouie kanaouennoù, met hervez klevet n’ he devoa ket an ton ! » (Elle connaissait des chansons, mais paraît-il, elle n’avait pas d’air !). C’est évidemment loin de la vérité quand on écoute les enregistrements sur rouleaux de cire que fit François Vallée de Marc’harit en 1900. Par con- tre, il est vrai que Louise possédait un style de chant unique et déroutant. Il est parfois difficile en effet de retrouver la ligne mélodique dans une interprétation qui laisse une large place à l’improvisation (ceci explique que beaucoup des chants que nous avons transcrits ne comportent pas de notation musicale). Pour Louise, le texte et l’histoire étaient primordiaux, la ver- sification passait parfois de 6 pieds à 8, voire à 13 ! Elle s’en accommodait toujours !